Je détestais éperdument devoir passer du temps avec lui. Une sorte de challenge que je me forçais à dépasser un peu plus chaque jour parce que d’une certaine manière, sa présence m’est bien plus essentiel que toutes celles que l’on pourrait me proposer. Je sais à quel point ma pensée peut être complexe. Je dirais alors qu’elle ressemble à cette relation que j’entretiens avec Konstantinos. Je ne parviens pas à m’en détacher, c’est une drogue à laquelle je succombe n’importe quand, n’importe où et dans n’importe quelles circonstances. Cependant, il faudra bien que je me détache de son emprise, de sa maitrise de moi. Il sait à quel point je suis faible que je suis près de lui, à quel point sa présence me fait du mal, mais me donne l’impression de vivre encore. Je ne pourrais plus respirer, je ne serais probablement plus là s’il n’était pas à mes côtés sans arrêt. Seulement, plus le temps avance, plus j’ai l’impression de m’éloigner, de le perdre. Une prise de conscience de ce mal qui me détruit, m’ouvre les portes de l’enfer ?

Ce soir-là, nous étions seulement entrain de danser, comme à notre habitude. Tout cela ne me faisait en aucun cas du bien. A cet instant précis, je pensais à ce jeu de lumière qui m’éblouissait tant de fois, les autres, la foule, me donnant le tournis et me bousculant pour mieux récupérer cette place que j’avais acquise depuis quelques secondes déjà. Puis, il y avait lui. Konstantinos à cette façon de se mouvoir, de se montrer intéressant à mes yeux que j’aurais du mal à pouvoir prétendre le contraire, mentir en prétextant qu’il n’est en aucun cas intéressant. Comme Pinocchio – et bien que la comparaison soit fort étonnante – un nez énorme me pousserait au milieu du visage. Nous nous désirons l’un à l’autre, un feu ne trouvant moyen de se consumer brûle dans nos veines à tous deux. Nous étions liés par quelque chose d’étrange, quelque chose qui nous poussait à se faire du mal mutuellement ou bien à continuer de se voir, sans cesse, pensant ne pouvoir se passer ni de l’un, ni de l’autre. Ma souffrance le fait vivre, sa vie me fait souffrir, un cercle infernal dont je n’envisage pas de me passer pour le moment. Après quelques pas de danse, nous rejoignons non sans grandes difficultés, le bar. Il me semble encore que cet endroit m’est familier, que nous nous y retrouvons plus souvent que je ne le crois, à cet instant précis. Puis peu importe, je me résous à commander la même chose que lui, danser m’ayant rendu assoiffé. Ses premières paroles ne me donnèrent guère l’envie de sourire, au contraire. J’aurais pu – avec un peu de volonté – me retourner face à lui et lui expliciter le plus clairement possible combien je le déteste. D’un autre côté, je n’ai pas cette volonté, cette curiosité, connaître sa réaction face à des paroles comme celles-ci. Je hoche alors un peu les épaules. Je m’en fiche que ce moment ne nous soit réservé, le pire est à venir, j’imagine.

Konstantinos prit la parole une seconde fois, d’une voix froide que je pourrais reconnaître tant il parlait ainsi. Qu’est-ce que ça pouvait bien lui faire ? Qu’est-ce que ma vie pouvait bien avoir de si précieux pour qu’il s’en préoccupe ainsi ? Néanmoins, comme à mon habitude, je ne pus m’empêcher de répondre, esclave de sa pauvre personne. « Pas encore, non. Je ne suis pas une princesse, mais plutôt la méchante sorcière. » Pauvre comparaison, mais tellement vrai. Derechef, je lui retourne cette question, d’une façon différente cependant. « Tu t’es occupé, j’imagine, durant tout ce temps non ? » Ce qu’il faisait en dehors de moi m’intéressait, parfois. En, sachant qu’il fréquente d’autres filles, qu’il puisse leur dire toutes ces belles choses auxquelles je dois s’abstenir de penser en sa présence. C’est surement en cela que notre relation est si étrange, si spéciale. J’aimerais trouver une explication à toute cette mascarade. Aucune ne m’est encore venue à l’esprit. « Quel est le programme de ce soir ? » Au moment même où la question se pose, les deux verres viennent s’inviter à ce qui parait être une conversation. D’une traite, je pus en boire tout le contenu.